En lisant sur Forbes un article(1) sur l’utilisation de IA pour la rédaction de texte, ce n’est pas un discours de prudence qui apparait mais encore cette frilosité qui tend à justifier une retenue. Les IA productrices de textes ne sont que des robots sémantiques. Elles sont programmés et leurs risques ne sont pas de la déshumanisation mais une standardisation, un moulage selon la pensée de leurs programmeurs. Des critiques ont toujours été proférées concernant les évolutions techniques et technologiques accessibles au plus grand nombre.
Nous ne perdrons pas l’humain dans les écrits
Pour l’utilisation des IA, il suffit de donner quelques repères et l’on sait quand un texte est produit par CHATGPT sans correction d’un humain. L’article sur Forbes, dont l’auteur est David Benguigui, Directeur marketing & communication 360 IONIS Education Group et vice-président du CMIT, est intitulé « Et si on mettait un peu d’humain dans ce texte ? ». Il met en question des aspects de l’écriture qui peuvent illusoirement nous sensibiliser sur l’authenticité, la créativité et l’éthique. Le propos consiste a déplorer qu’un auteur ait pu demander à une IA de produire un texte et que la version manquant de tonalité émotionnelle, l’humain a formulé la demande à l’IA d’introduire cet aspect dans le texte. Il s’agirait de constater que les IA aurait un effet général castrateur. Il convient de revenir sur certaines idées pour se centrer sur l’évolution formidable à laquelle nous participons.
L’écriture a toujours façonné notre civilisation, et avec l’arrivée de l’intelligence artificielle, elle est sur le point de subir une transformation majeure qui changera notre manière de communiquer et de préserver le savoir.
Passons sur la notion “d’intelligence artificielle” dont le concept est très critiquable. Dans un premier temps, nous pouvons faire le simple constat que l’écriture est civilisatrice. Elle n’en comporte pas moins des travers et pour progresser, il convient de faire entrer cela dans nos paramètres critiques. Il suffit de penser à l’établissement d’un contrat. Si jamais les relations se détériorent au point qu’un conflit survienne, alors le contrat n’est plus lu comme il a été écrit. Les tournures de phrases prennent des sens nouveaux. Voilà ce qu’il en est d’un des risques majeurs de l’écrit. Et ce n’est pas le seul. Les IA n’y changeront rien.
Et les paroles peuvent s’envoler…
L’écriture a environ 5 000 ans, apparue dans des sociétés telles que la Mésopotamie (écriture cunéiforme) et l’Égypte (hiéroglyphes), dédié à la comptabilité et l’administration avant de devenir un moyen d’expression littéraire, philosophique et scientifique. Comparée à l’histoire de l’humanité (environ 200 000 ans), l’écriture est relativement récente. Avant l’écriture, les sociétés humaines transmettaient les connaissances et les traditions oralement, une pratique qui fixait la mémoire collective de manière dynamique mais éphémère. L’écriture a permis de fixer et de transmettre l’information de manière plus durable et précise. Elle a révolutionné ainsi la conservation du savoir et façonné, nous le verrons, les repères qui doivent être considérés comme des connaissances. Néanmoins, il convient bien de le souligner, la mémorisation orale avait ses sélections et l’écriture aussi, ce qui ne permet pas d’attribuer plus de fiabilité à l’écriture qui est trompeuse par le fait qu’à la différence des paroles, les écrits restent.
L’évolution de l’écriture jusqu’à l’informatique du 21ème siècle
L’écriture a évolué, avec l’imprimerie, puis la machine à écrire, avec toutes ses variantes, et soudain l’ordinateur. Chacun de ces procédés et moyens a transformé la manière dont les humains ont produit et consommé les informations. Ces technologies ont non seulement exercé un rôle sur la production des contenus, mais elles ont transformé la diffusion de la connaissance et la perception des faits historiques.
L’introduction de l’IA est une continuation naturelle de cette évolution. Tout comme l’imprimerie a révolutionné l’accès à l’information, l’IA transforme la production et la personnalisation des contenus. L’IA permet de gérer la surcharge d’information et répondre aux besoins modernes de production de contenu en masse, tout en offrant des outils pour améliorer la qualité et la pertinence des textes. Ne peut-on voir l’intérêt formidable qui fait de l’humain la ressource critique, avec sa vigilance, son attention, sa rigueur, sa méthode ? Il devient potentiellement libéré de données pour se consacrer à la perspicacité et la pertinence. Le plus grand défi est là, dans l’exigence renforcé de l’enseignement de l’esprit critique. L’outil informatique, dont l’intelligence est très discutable, reste tel le marteau, un instrument à son service, pour construire avec application et conscience une civilisation éthique.
Quand l’écriture aura 10.000 ans …
Imaginer l’écriture dans 5 000 ans ! Il en restera quoi ? Sans doute quelques invariants. Imaginez l’écart entre la culture d’un champ à la bêche et le passage au tracteur. L’humanité avance si lentement dans son appropriation intellectuelle, son usage de la rationalité, de la conscience et de la réflexion. Elle apparaît si lente en intelligence immatérielle par rapport à la production et l’innovation technologique. Imaginez l’impact des technologies émergentes, avec la réalité augmentée, les interfaces cerveau-machine et d’autres innovations qui pourront transformer notre rapport à l’écriture et à la communication.
L’histoire montre que les humains adaptent et intègrent les nouvelles technologies tout en trouvant des moyens de préserver l’expression individuelle et collective. La clé pourrait bien résider dans l’utilisation plus consciente des technologies. Quel que soit l’usage des nouvelles technologies, l’avenir de l’écriture restera un phénomène intrinsèquement humain.
Cette perspective souligne que, bien que les outils et les méthodes changent, l’essence de l’écriture contribue interactivement à l’évolution de l’humanité, avec la variation des conceptions civilisatrices. Dans tous les cas, l’esprit critique évolue mieux en se libérant d’un certain nombre de contingences que l’on ne soupçonne pas aujourd’hui, comme on ne les soupçonnait pas hier.
C’est grâce à ces technologies que nous pouvons aussi mieux comprendre ce qui peut permettre d’améliorer les relations humaines dans tous les domaines. Un nouvel outil au service de la qualité des relations, NEXUS, vous sera présenté à Preventica, à Strasbourg, le 20 juin 2024.